Lubero : Eucalyptus, une culture qui rend de champs moins fertiles

Jonas Kiriko - Africa Reveal - 10 mai 2021

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Plantation d'eucalyptus à Lubero
Plantation d'eucalyptus à Lubero - Africa Rveal - Jonas Kiriko

Depuis plus d’une décennie, il est de plus en plus difficile de trouver des forêts dans le sud du territoire de Lubero à plus de 170 kilomètres au nord de la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Pour y faire face, des paysans ont résolu de reboiser moyennant des eucalyptus aux alentours des grandes agglomérations dans cette zone. Cependant, ce reboisement se fait au grand dam des champs destinés à des cultures vivrières, les rendant ainsi moins fertiles, alerte l’organisation paysanne Apad.

Les eucalyptus appartiennent à la famille botanique des myrtacées. Les Eucalyptus ne sont pas natifs de la région. Elles sont originaires d’Australie, un pays d’Océanie. Il existe plusieurs espèces du genre Eucalyptus. Wikipédia précise qu’ils sont environs 800

Selon l’Association paysanne pour le développement APAD, Il y a maintenant une tendance générale de nature à favoriser le reboisement moyennant des eucalyptus au détriment de l’agriculture. Ce qui n’est pas sans incidence négative sur la fertilité du sol car après la coupe du bois, le champ ne peut plus servir à rien.

« Cette situation se constate auprès de nos membres paysans qui commencent de plus en plus à s’en plaindre. On remarque que les eucalyptus chassent de plus en plus les cultures vivrières plus loin vers les zones où l’on peut encore trouver la forêt naturelle devenue pourtant rare. Les champs qui étaient destinés aux cultures de haricot, des patates douces, des ignames et des sojas et autres, sont convertis en champs d’eucalyptus », s’attriste Syauswa Malona membre de l’APAD.

Et d’ajouter

« Nous avons fait une petite expérience dans un champ d’un de nos membres. Ce champs d’environs ½ hectare produisait avant 8 sacs de farine de manioc de 100 kg chacun, ainsi que des haricots. Ce qui n’était plus le cas après y avoir mis des eucalyptus et cela nous a conduit à conclure que cette variété d’arbre en était la cause. Les exemples sont multiples avec certains autres paysans qui ont vu leurs terrains marécageux sécher après y avoir plantés des eucalyptus », explique-t-il.

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Une jeune pousse d'eucalyptus

 

Gagner de l’argent peu importe le coût

Le problème devient d’autant plus réel que même les champs qui sont encore favorables à l’agriculture sont transformés en plantations d’eucalyptus. Dorothée Wanzire en a payé les frais : « Dans la plantation (ferme)d’Albert située dans la périphérie de la commune rurale de Kayna, je produisais du manioc, des maïs ainsi que des haricots, on vient me dire que mon lopin, ainsi que ceux des voisins ont été cédés à une tièrse personne. Et quand je m’y suis rendis, j’ai trouvai que le nouveau propriétaire y avait déjà planté les arbres eucalyptus. Quand voulait me plaindre auprès du propriétaire de la ferme, on m’a dit que je ne payais pas assez » a déclaré Dorothée à Africareveal.net.

D’autres pesanteurs peuvent expliquer le recours à la culture des eucalyptus. Selon Bavon Mbafumoja du programme d’action locale, PAL ; tout commence par la mauvaise récolte. « Il arrive que le vassal ne produise pas assez pour payer la redevance au chef terrien. Comme ce dernier ne reçoit plus son dû, il trouve quelqu’un qui lui propose de planter les Miharamba (Ndlr Une variété d’eucalyptus en langue du peuple Nande.) sur sa terre et chasse ainsi l’agriculteur. C’est fini pour l’agriculteur, il ira se débrouiller ailleurs.”,

Pas seulement :

« Cela s’explique la forte demande des planches à base d’eucalyptus dans les grandes agglomérations comme Goma où les habitations sont faites des planches. Ainsi, nombreux sacrifient l’agriculture vivrière au profit de celle des eucalyptus pour de faire de l’argent », fait-il savoir.

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Les plantations aux alentours des eucalyptus

 

Quelques pistes pour y faire face

Face à ce défi, les agriculteurs s’éloignent de plus en plus de la ville pour aller ouvrir des nouveaux champs dans les zones éloignées où on pourrait encore retrouver la forêt naturelle, entrainant ainsi une menace de déforestation. Ce qui parait un peu comme un cercle vicieux auquel on assiste, craint Sorel Wasukundi enseignant à la faculté de l’agronomie de l’Université Catholique du Graben UCG. Il propose que les habitants recourent à d’autres essences qui permettent de garder la terre fertile.

Selon www.lavoixdelucg.net qui relai les propos du professeur Mutiviti, l’acidification du sol par les eucalyptus est réversible. Dans les centres urbains, on s’en contente du moment qu’il n’y a pas encore pénurie alimentaire : « Actuellement, les gens vont ouvrir de nouveaux champs dans la savane boisée du Graben. Ces régions fournissent de la nourriture et l’on ne sent pas encore un déséquilibre, mais ce déséquilibre arrivera tôt ou tard et on sera peut-être obligé reconvertir les plantations d’eucalyptus en plantations des produits vivriers », avait-il fait savoir.

Alors candidat aux élections législatives de 2018 dans le territoire de Lubero, Arsène Makasi avait proposé la négociation avec les fermiers et les grands propriétaires de terre, pour qui les troupeaux sont en baisse de mettre leurs fermes à la disposition de paysan. C’était pour lui la solution à l’infertilité du sol et au manque des terres dans la zone. Il appelait ça métayage une pratique qui consiste à louer des terres moyennant des récoltes ou encore des services.

 


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