Nord-Kivu : éruption du Nyiragongo, l’exemple d’une impréparation à une catastrophe pourtant prévisible

Jonas Kiriko - Africa Reveal - 24 mai 2021

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Eruption du volcan Nyirangongo dans la nuit du 22 mai 2021

 

Le volcan Nyiragongo, l’un des plus actifs du monde, est entré en éruption samedi 22 mai à Goma, vers 19 heures selon des sources officielles. L’on comptabilise plus d’une dizaine des morts notamment par accident, par balle et des calcinés dans leurs habitations, aux côtés d’important dégâts matériels dont des habitations détruites et la voie principale qui relie la ville de Goma au territoire de Rusthuru. Ce qui a été vécu était prévisible. Le volcan en éruption, aucune alerte de l'observatoire volcanologique, aucun plan d'évacuation actionné, etc. Nous alertions déjà mais les autorités n’ont rien vu venir déplorent plusieurs acteurs sociaux.

C’est vers 21 heures que le gouverneur militaire lieutenant General Constant Ndima a confirmé sur l’antenne locale de la RTNC, que le volcan de Nyiragongo était entré en éruption.

« Je confirme l’éruption du volcan Nyiragongo depuis ce 22 mai 2021 vers 19h. Les investigations sont en cours, la population est appelée à suivre les orientations du service provinciale de la protection civile et de suivre le plan de contingence » avait alors déclaré le gouverneur.

Un déficit communicationnel qui pour beaucoup était aussi dangereux que la lave.

Nombreux n’ont pas attendu la communication du gouverneur considérée comme tardive. Au niveau du système d’alerte implanté par ici, par-là dans la ville de Goma et environs l’alerte était jaune ce qui signifie que le volcan était actif mais qu’il ne constituait pas une menace sur la ville.

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La lave du volcan s'approchant d'une habitation.

« Lors des exercices de simulations en 2018 sur l’attitude à prendre en cas d’éruption volcanique, l’on nous indiqué qu’une sirène devait retentir pour nous alerter sur l’éruption du volcan. Mais ça n’a été le cas », se plaint Rosette Ndondo qui a fui au Rwanda et pour qui l’OVG doit des explications à la population pour cette omission grave.

Pendant ce temps la situation était intenable car à l’absence d’une alerte précoce, les réseaux sociaux ont fait l’affaire. Des vidéos amateurs ont enflé sur Facebook et sur WhatsApp paniquant ainsi la population qui ne savait pas quelle destination. Kabuyaya Nicolas habite Buhene dans le territoire de Nyirangoma à la limite avec la ville Goma. Il dit avoir tout appris via WhatsApp et qu’on lui parlait du volcan de Nyamulagira voisin à Nyiragongo.

« Je n’ai pas attendu parce que la situation me paraissait intenable par les autorités. J’ai tenu mes deux filles à la main, quelques documents nécessaires puis nous avons pris la destination de Sake à l’Ouest de Goma. C’est alors que nous alors croiser sur le chemin un véhicule accidenté ». Nicolas n’a pas atteint sa destination à cause des embouteillages montre sur le chemin.

De l’autre côté se sont les journalistes qui se sont plaint contre les animateurs de l’observatoire volcanologique de Goma. Ceux-ci ne répondaient pas aux appels des journalistes qui voulaient informer la population de ce qui se passait.

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Vue du bureau de l'observatoire volcanologique de Goma

« Dites à l’OVG de décrocher les appels des journalistes car mon téléphone va exploser suite aux réclamations des auditeurs qui veulent savoir ce qui se passe », a écrit sur sa page Facebook Merveille Kiro journaliste à Blessing Fm émettant de Goma.

Même réclamation de la part de Prince Bagheni journaliste à Grand lac plaine évangile pour qui les scientifiques de l’OVD n’avaient aucune considération envers les journalistes locaux.

 « Je suis surpris de les attendre dans l’Edition de 20h30 sur RFI alors qu’ils de prendre nos appels depuis que les rumeurs sur l’éruption ont commencé à circuler », tacle ainsi Prince dans un forum WhatsApp dédié aux journalistes du Nord-Kivu.

Pour y remédier, Rashid Amuri Kasongo enseignant de communication dans plusieurs universités du Nord-Kivu, a appelé le gouvernement provincial à mettre en place une cellule permanente de communication de crise car selon lui, cette éruption est une illustration parlante d’une communication bâclée.

« Elle est à grande partie à la base des dégâts enregistrés dont la plupart auraient pu être évité », a –il déclaré à AFRICAREVEAL.NET.

Des dysfonctionnements au sein de l’OVG dénoncés

Selon radio okapi, qui cite le ministre de la Recherche scientifique et Innovation technologique, José Mpanda Kabangu, l’Observatoire volcanique de Goma (OVG) dispose de moyens logistiques nécessaires, pour prévenir en temps réel la population de l’évolution de la situation volcanique.

Cependant il reconnait les dysfonctionnent au sein de ce service : « C'est vrai, je confirme que l’Observatoire volcanologique de Goma (OVG) a eu un problème de fonctionnement et même les partenaires japonais et européens qui donnaient ont eu à suspendre un peu, parce que leur partenariat était presqu'à la fin. Toutes les instructions sont données. Nous serons sur le terrain pour donner les moyens qu’il faut, pour les chercheurs, et éventuellement prendre en charge sur le plan humanitaire, la population », a fait savoir le ministre.

Pour le journaliste à Congo cheik Rodriguez Katsuva, l'Observatoire Volcanologique de Goma doit plus de 10 mille dollars à la société qui lui fournissait internet. Du coup on leur avait coupé la connexion.

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 « Il y a eu de gros problèmes de mégestion et de détournement de fonds au sein de l'OVG. Si l'IGF pouvait s'y pencher ! Puis un autre scandale à l'OVG En 2020, le ministre de la recherche scientifique avait déjà révélé que sur les 351 agents de l'OVG, au moins 250 étaient fictifs », a écrit le journaliste sur son compte twitter.

En date du 02/10/2020, le député national Muhindi Kasekwa élu de Goma dit avoir alerté le Ministre de la Recherche Scientifique via l'Assemblée Nationale sur l'interruption prolongée de la surveillance des volcans et du gaz dans le lac Kivu.

« Convoqué à se présenter à la plénière du 02/12/2020 le ministre avait sollicité une remise au 10/12/2020. Cette date a coïncidé avec la déchéance du Bureau Jeannine Mabunda. Depuis lors, le bureau Mboso Nkodia a jeté la question à la poubelle au profit de querelles politiciennes. D'autre part, bien que reconduit, le Ministre de la Recherche Scientifique, Mr José Panda n'y a pas accordé l'attention nécessaire. Je dénonce cette cruauté à abandonner la population à son triste sort alors qu'on aurait dû prendre de dispositions salutaires », a déclaré le député.

Le mouvement citoyen Lucha s’était aussi penché sur la question.

« Depuis plus de 2ans, notre mouvement est engagé au côté des agents de l'observatoire Volcanologique de Goma (OVG) pour exiger une gestion transparente de cet établissement d'utilité publique. A l'exemple de cette lettre que nous avions adressée le 02 Avril dernier au responsable de l'Union Européenne, principal bailleur de fonds de l'OVG, nous ne cessons d'alerter différents acteurs sur les soupçons des détournements, corruption, abus de pouvoir et mégestion des projets à l'OVG ainsi qu'appeler à un audit général au sein de cette organisation » a fait savoir Gislain Muhiwa militant de la Lucha qui reconnait au même moment une avancé dans le dossier.

Des séismes à ne point terminer

La coulée de lave du volcan Nyiragongo s’est arrêtée vers le petit matin de dimanche 23 mai.

Mais les tremblements de terre continuent à être ressentis à Goma et environs jusque ce lundi la mi-journée. Ce qui n’est pas de nature à rassurer la population locale.

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Un quartier près de Goma ravagé par les cendres du volcan

 

Nombreux sont obligés de fuir leur habitation ainsi que des bureaux qui se situe au centre-ville de Goma. C’est l’exemple de la radio communautaire Tayna qui se trouve dans l’immeuble BDGL et dont les journalistes sont obligés de travailler à l’extérieur.

 C’est aussi le cas d’autres organisations qui carrément appellent leurs travailleurs à un télé travail.

C’est dans ce contexte qu’une délégation gouvernement mentale est arrivée à Goma pour essayer d’apporter une réponse humanitaire à des nombreux sinistrés de cette catastrophe naturelle.

Notez que la dernière éruption remonte à février 2002, après celle de 1977.  Il est parmi les volcans les plus actifs de la région à côté du Nyamulagira distant seulement de 5 km. Ce dernier, entre en éruption presque chaque année, déversant ainsi sa lave dans le parc national des Virunga, loin des habitations.

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Une maison après les tremblements de terre

 


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