C’est ce que révèle une étude publiée dans la Revue Proceedings of the National Academy of Sciences. Selon l’étude, ce retrait représente trois fois les émissions de dioxyde de carbone du Royaume-Uni en 2019.
El Niño est un phénomène climatique correspondant au réchauffement accentué des eaux de surface près des côtes de l’Amérique du Sud, entraînant des perturbations climatiques à l’échelle mondiale.
“L’absorption nette de carbone des forêts tropicales africaines intactes a été supérieure aux pertes de carbone dues à la mortalité des arbres, car les forêts ont continué à fonctionner comme un puits de carbone malgré la chaleur et la sécheresse”
Amy Bennett, université de Leeds
Les chercheurs de l’université de Leeds, en Grande Bretagne, qui ont mené l’étude, ont quantifié cette absorption de carbone à partir de l’observation de 46 000 arbres dans 100 forêts tropicales différentes dans six pays africains : Cameroun, République Démocratique du Congo, Gabon, Ghana, Liberia, et République du Congo).
En mesurant la hauteur et le diamètre, ainsi que la croissance et la mortalité des arbres, ils ont pu calculer le carbone de la biomasse aérienne et son évolution dans le temps.
Ce travail a permis de montrer que les forêts tropicales africaines intactes ont été un puits de carbone net, ralentissant les changements climatiques en absorbant le dioxyde de carbone de l’atmosphère.Amy Bennett, chercheure à l’université de Leeds et auteure principale de l’étude, a expliqué à SciDev.Net qu’au fur et à mesure que les arbres grandissent, ils absorbent le carbone de l’atmosphère.
« Ce carbone est rejeté dans l’atmosphère lorsqu’ils meurent et se décomposent. Ainsi, tant que la quantité de carbone absorbée par les arbres est supérieure à la quantité de carbone rejetée du fait de la mort des arbres, les forêts tropicales africaines continueront à être un puits de carbone net et à éliminer le dioxyde de carbone de l’atmosphère ».
Elle précise qu’avant El Niño, « l’absorption nette de carbone des forêts tropicales africaines intactes a été supérieure aux pertes de carbone dues à la mortalité des arbres, car les forêts ont continué à fonctionner comme un puits de carbone malgré la chaleur et la sécheresse ».
Pressions anthropiques
Réagissant à cette étude, Yabi Ibouraima, professeur d’agroclimatologie à l’université d’Abomey-Calavi (Bénin), estime que la préservation des forêts de toutes sortes de pressions anthropiques (exploitation forestière, urbanisation) peut constituer un véritable frein à l’accélération du réchauffement climatique et limiter la modification des climats locaux.
Pour ce dernier, la dégradation des forêts reste la menace majeure pour le climat, et la préservation de celles-ci demeure un régulateur du climat.
La réaction positive des forêts tropicales africaines aux conditions les plus chaudes et les plus sèches et aux changements climatiques n’a pas été observée dans d’autres forêts des régions du monde.
Amy Bennett relève qu’en Amazonie, les grandes sécheresses de 2005 et 2010, et en Asie, le grand événement El Niño de 1997-1998, ont montré soit une croissance des arbres sensiblement plus lente, soit une mortalité beaucoup plus élevée des arbres en réponse à une sécheresse et une chaleur extrêmes.
« Dans tous ces cas, les conditions ont conduit à un arrêt ou à une inversion temporaire du puits de carbone des forêts tropicales dans ces régions. La résistance du puits de carbone des forêts tropicales africaines à la température et à la sécheresse est donc une découverte nouvelle », souligne-t-elle.
La chercheure ajoute que les impacts de l’anomalie climatique sur les forêts tropicales africaines ont été négatifs, mais pas aussi forts que les effets négatifs observés sur d’autres forêts tropicales en réponse à la sécheresse.
Incitation
« C’est une bonne nouvelle que les forêts africaines soient capables de tolérer un peu plus de chaleur et de sécheresse que par le passé, et une incitation supplémentaire à maintenir les augmentations de température mondiale à 1,5 degré Celsius, comme indiqué dans l’Accord de Paris, car ces forêts semblent pouvoir résister à des augmentations limitées de température et de sécheresse », conclut Amy Bennett.
Toutefois, les chercheurs disent ne pas savoir exactement pourquoi ces forêts ont toléré la chaleur et la sécheresse, mais ils pensent que « cela pourrait être dû à leur structure forestière, car elles ont moins d’arbres plus grands, les espèces présentes pourraient avoir d’abondantes espèces tolérantes à la sécheresse, ou qu’elles ne se réchauffent pas aussi vite que les forêts tropicales sur d’autres continents ».
Quoi qu’il en soit, explique Yabi Ibouraima à SciDev.Net, « les forêts créent des ambiances moins chaudes et sont des surfaces d’évaporation qui enrichissent, au moins localement, l’atmosphère en humidité qui favorise la pluie. Quand elles disparaissent ou sont dégradées, elles perdent leurs avantages climatiques ».
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